Le volcanisme dans le Moyen Atlas : Cadre climatique, géologique et géographique

Le Moyen Atlas (الأطلس المتوسط ) est un massif montagneux allongé sur quelques 350 km, du sud-ouest au nord-est du Maroc, situé entre le Rif et le Haut Atlas, et couvrant une superficie totale de 2,3 millions d'hectares, soit 18% du domaine montagneux de ce pays. Il intéresse principalement les provinces de Khénifra, Ifrane, Boulemane, Séfrou, El Hajeb, ainsi qu'une partie des provinces de Taza et de Beni Mellal que l'on désigne sous le nom de « porte du Moyen Atlas ». Cette chaîne appartient au massif de l'Atlas, et plus précisément, à l'un des trois éléments de l'Atlas marocain — les deux autres étant le Haut Atlas et l'Anti-Atlas. C'est un ensemble de hautes terres, d’altitudes supérieures à 1000 m, en position centrale entre le Rif, le haut Atlas, la Moulouya, la plaine du Tadla et les bas plateaux du Saïs. Le Moyen Atlas comprend deux parties bien distinctes : une zone tabulaire, et une zone plissée, séparées l’une de l’autre par la coupure de l’Oum-Rbia et de l’oued Guigou, avec par endroits des cassures ayant entraîné des épanchements volcaniques. La zone tabulaire est formée de trois paliers successifs : causse d’El Hajeb (1000à 1500m) causse d’Azrou (1500 à 1700 m) et causse de Timahdite (1700 à 1900m).

A. Cadre climatique  
Le climat qui règne dans le Moyen Atlas est de type méditerranéen de montagne, il se caractérise par un climat humide et froid. Ce climat particulier du Moyen Atlas est dû essentiellement à sa position altitudinale, sa situation géographique et son exposition aux influences marines (Martin, 1981).Les nuages venant de l’ouest donnent des précipitations abondantes (pluie, neige) au contact du Moyen Atlas. La barrière naturelle que forme la chaîne Atlasique crée une dissymétrie sur le plan climatique : la façade atlantique exposée aux vents venant du NW est plus arrosée ; quant à la façade SE qui est soumise à l’influence du climat saharien.

1. Précipitations : Les précipitations au niveau du Moyen Atlas peuvent être sous diverses formes (pluies ou neige) selon l’altitude. Généralement la neige apparaît à partir de 1200 m ; mais cette limite connaît des fluctuations altitudinales selon les années (Baali, 1998).Les mesures pluviométriques effectuées dans une vingtaine de stations réparties dans le Moyen Atlas tabulaire, entre 1933 et 1963, ont permis de tracer les isohyètes de la figure 1.
fig.1 : Carte des isohyètes du Moyen Atlas central pour la période 1933-1963.

Ces isohyètes mettent en évidence une zone à pluviométrie élevée qui s’étend de la bordure occidentale du Causse depuis Imouzzère de Kandar au nord jusqu’à Ouiouane au sud, incluant Ifrane et Aïn Leuh. Cette zone comprend les premiers reliefs occidentaux constituant une barrière contre laquelle viennent buter les vents humides de l’océan, elle reçoit une quantité de précipitations assez élevée (de 700 à 1150 mm) par rapport aux basses terres voisines dont la lame d’eau tombée annuellement ne dépasse guère 700 mm. De ce fait, le Moyen Atlas n’est donc pas une entité homogène, et présente de fortes variations orientées principalement par l’orographie, les précipitations décroissent rapidement en direction du Moyen Atlas plissé. Le régime de précipitations est typiquement méditerranéen. Les pluies s’étalent de septembre à juin quel que soit le secteur. Le pic de précipitations se produit au mois de septembre. La pluviométrie est marquée par deux maximas : novembre décembre et février-mars. Les précipitations des neiges les plus prolongées se produisent dans la façade ouest de l’escarpement d’Azrou et dans la zone sud du Moyen Atlas. La fonte de ces neiges est due à des vents chauds venant du Haut Atlas à la fin du mois de mars et avril. La décharge enregistrée pour oued Sebou ou oued Oum Er-Rbia reflète la fonte des neiges avec un pic en mois d’avril d’environ 90 m3/s.

2. Température : Le Moyen Atlas est une région où la température est principalement influencée par l’altitude, elle est plus basse par rapport aux plaines et plateaux avoisinants (plaine de Saïs et plateau de Moulouya) ayant des températures moyennes annuelles plus élevées : 17,8 °C à Fès et Meknès (altitude de 400 à 530 m) et 17,3 °C à Khénifra (750 m d’altitude). En général, la température est caractérisée non seulement par sa variabilité d’un point à l’autre, mais aussi par de grands écarts entre les températures maximales et minimales journalières, mensuelles ou annuelles. La température moyenne annuelle sur l’ensemble des Causses est de 12 °C. La moyenne annuelle des températures minimales relevées au cours de la saison des pluies (d’Octobre à Mai) est de 3,8 °C à Ifrane, 6,9 °C à Imouzzère et 9,4 °C à Azrou. Alors que dans les régions voisines, la moyenne annuelle des températures minimales sont plus élevées : 11,1 °C à Fès, 10,8 °C à Meknès et 9,1 °C à Khénifra.

3. Vent :
Les vents dominants soufflent dans deux sens presque opposés. De l’Ouest vers l’Est souffle le Gharbi, vent humide dominant en hiver. De l’Est vers l’Ouest souffle le Chergui, vent sec et chaud dominant au printemps et en été, et souvent chargé d’éléments détritiques fins (poussières) provenant du Sahara. Le régime des vents a certainement un rôle important dans le mélange des eaux des lacs notamment les moins profonds.

4. hydrologie : Le Moyen-Atlas, château d’eau du Maroc par excellence, est la chaîne montagneuse la mieux arrosée et la plus riche en zones humides, notamment en lacs naturels, en rivières et sources fraîches. Le Moyen Atlas appartient à trois grands bassins hydrogéologiques qui correspondent grossièrement par leur situation aux trois grands bassins hydrographiques de la Moulouya, du Sebou et d'Oum Er-Rbia. Ces deux derniers et leurs affluents (l’oued Serou pour le bassin d’Oum Er-Rbia au S et l’oued Beht pour celui de Sebou au NW) drainent le Causse moyen atlasique. Le Moyen Atlas est donc le siège de quatre grandes catégories d’eaux continentales habituellement reconnues par les limnologues : eaux stagnantes, eaux courantes et sources, zones humides artificielles et eaux phréatiques sont bien représentées au Moyen Atlas.

B. Cadre géologique :
Le Maroc est subdivisé en trois domaines structuraux : le domaine rifain au nord, le domaine meseto-atlasique au centre et le domaine anti-atlasique et saharien au sud (figure 2a). Le Moyen Atlas qui appartient au domaine meseto-atlasique regroupe deux entités structurales différentes (figure 2b) : le Moyen Atlas plissé à l’Est et le Causse Moyen Atlasique (zone d’étude) à l’Ouest. Ces deux structures sont séparées par un accident majeur nommé « accident nord moyen atlasique».
fig.2 : a- carte du Nord du Maroc montrant les grands domaines structuraux. 
b- Carte géologique simplifiée du Moyen Atlas.

1. Affleurements géologiques : Les terrains antéjurassiques constituent le substratum profond du Causse moyen Atlasique. Le socle n’apparaît que sur le versant occidental : à Azrou par exemple, les schistes et les calcaires viséens, arasés puis soulevés en bloc affleurent jusqu’à 1 600 m d’altitude. Ailleurs, ce n’est qu’à la faveur de bombements que le socle apparaît en boutonnière : au SE de Séfrou et au J. Kandar près d’Imouzzère. Le Trias recouvre les terrains primaires en discordance. Il est beaucoup plus fréquemment représenté, non seulement sur toute la bordure occidentale mais aussi sur le plateau. En effet, les accidents tectoniques le font affleurer très souvent, de même que l’érosion qui a laminé et défoncé les couches du Lias. Les grandes vallées, comme celles de l’Oum er Rbia, du Serou, se sont essentiellement entaillées dans les couches tendres du Trias.

Cet étage présente en effet deux faciès de roches tendres : à la base, une épaisse couche d’argilites rouges parfois salifères, au-dessous des bancs de dolé rite plus ou moins altérée, brun-jaunâtre, verdâtre ou violacée. La dolérite offre une résistance à l’érosion plus grande que les argilites mais plus faible que le Lias qui la surmonte. 

Le Lias couvre presque toute la surface du Causse moyen atlasique. Il repose en concordance sur le Trias. Il s’agit essentiellement des dolomies peu résistantes à la base, soit très fractionnées et concassées, soit très altérées et fournissant des sables dolomitiques : c’est ce qu’on appelle le faciès des dolomies sableuses. De façon moins générale, la dolomie se présente ensuite' en gros bancs donnant des abrupts discontinus. Ces formations du Lias inférieur sont surtout représentées au S des Causses ainsi qu’au NW. 

Au-dessus, le Pliensbachien inférieur se caractérise par toute une série de bancs dolomitiques et calcaro-dolomitiques, à la stratification bien visible, d’où l’appellation de « dolomie litée ». D’un banc à l’autre d’ailleurs, la texture, la couleur, le faciès varient très sensiblement. Le Pliensbachien supérieur et le Domérien se présentent avec des faciès calcaires en bancs assez minces, très diaclasés avec souvent de fines interstratifications marneuses. Ces étages du Lias moyen, dolomitique et calcaire, sont surtout représentés dans la partie centrale des Causses. Le Lias supérieur est beaucoup plus rare : seuls quelques synclinaux des Causses d’Aïn Leuh et d’El Hammam en ont conservé des affleurements de calcaires marneux Les terrains postliasiques sont peu étendus. Le Dogger, le Crétacé et l’Eocène se sont accumulés dans le grand synclinal de Bekrite - Timahdite, au contact du Moyen Atlas plissé. On peut, d’autre part, citer les accumulations de conglomérats, de calcaires lacustres et de travertins tertiaires et quaternaires qui jalonnent les bordures en constituant des buttes ou de grands placages et qui remplissent plusieurs dépressions au N du Causse. 

Au cours de la première moitié du Quaternaire, des phénomènes volcaniques sont venus modifier le paysage du Causse. Des cônes volcaniques, des cratères et d’énormes épanchements basaltiques recouvrent le plateau d’Azrou en particulier. Des coulées ont dévalé jusque dans la plaine d’Azrou - Aïn Leuh ou se sont enfilées dans les vallées des oueds Oum er Rbia, Guigou, Tizguite, etc.

2. Les mouvements tectoniques : Les terrains secondaires ne totalisent qu’une assez faible couverture sédimentaire sur le socle de la Meseta. Tous les mouvements de ce socle ont donc été fidèlement enregistrés dans le Causse. L’allure tabulaire de ces plateaux ne doit pas faire illusion. La couverture liasique est fréquemment ondulée : ce sont des bombements, des cuvettes évasées, des chaînes qui accidentent les plateaux s’étageant en paliers successifs reliés par des flexures peu marquées. On peut citer l’exemple d’un de ces chaînons qui culmine à 2100 m au J. Taïliloute et qu’on peut suivre à travers tout le Causse d’Azrou à Séfrou. 

Plus encore que ces mouvements souples, la tectonique cassante joue un rôle morphologique fondamental. Les moindres fractures ont guidé le réseau hydrographique. Des failles de plus ou moins grande ampleur délimitent les escarpements des bordures. Toute la région est hachée de failles qui exagèrent les synclinaux qui deviennent des fossés tectoniques, dénivellent des blocs monoclinaux. Beaucoup de ces cassures ont rejoué jusqu’auQuaternaire. Les directions les plus fréquentes sont SW-NE et NS ainsi que EW entre Oum er Rbia et Serou. 

Il faut ajouter que de grands mouvements de gauchissement ont basculé d’énormes panneaux : par exemple le Causse d’Aïn Leuh plonge doucement vers le NE et tourne le dos au Causse d’El Hammam qui s’incline vers le SW. 

Au total, les mouvements tectoniques ont créé une diversité des secteurs géographiques qui apparaît mal au premier coup d’oeil.

C. Cadre géographique :
Le volcanisme quaternaire, essentiellement effusif a été émis par 90 volcans grossièrement alignés selon un axe N 170. Les coulées s'étalent largement sur le causse et débordent au Nord sur les formations quaternaires anciennes de la plaine du Sais ; elles sont canalisées à l’Ouest par les vallées des oueds Beht et Oum er Rbia et à l'Est dans la dépression de l'oued Guigou. Les appareils volcaniques sont pour les deux tiers des cônes de scories soudées (spatter- cônes), le dernier tiers étant représenté par des maars. Parmi ceux-ci, l’ouverture phréatomagmatique est fréquemment (10 cas) suivie d’une activité « strombolienne ». Cinq de ces appareils donnent naissance à des flots de laves importants (tel le jebel Tama- rakoit ayant émis un volume estimé à 3 km3 et dont l’une des coulées a suivi le cours de l’Oum er Rbia sur près de 100 km). 

La densité maximale des points d’émission (80%) se rencontre sur le causse où les appareils sont fréquemment associés en groupes composites alignes selon une direction N 70. Au Sud, les volcans sont beaucoup plus disséminés, et plusieurs d’entre eux sont localisés sur des fractures N 40-50. Les maars, certainement favorisés par l’eau de circulation karstique, ne sont pas uniquement situés sur le causse et se rencontrent aussi dans le Moyen Atlas « plissé » et en Haute Moulouya. 

Les laves sont essentiellement des basaltes alcalins, des basanites ou basanitoïdes, associés à des néphélinites en quantité très subordonnée (5 %). Aucun produit différencié, n’a été rencontré. Une dizaine d’appareils sont particulièrement remarquables par la quantité, la taille et la variété des enclaves ultrabasiques et basiques, mais celles-ci sont connues dans la presque totalité de la région.

Bibliographie :
ADALLAL Rachid. (2013) : Etude hydrochimique des systèmes lacustres et sédimentation actuelle dans les lacs Azigza et Tigalmamine (Moyen Atlas, Maroc).
Harmand, C. et Moukadiri, A. (1986) : Synchronisme entre tectonique compressive et volcanisme alcalin : exemple de la province quaternaire du Moyen Atlas (Maroc).
Lhoucine KARRAT. (1992) : Altération météorique de basaltes quaternaires en domaine méditerranéen de montagne (Moyen Atlas, Maroc).
Jaque MARTIN. (1981) : Le moyen atlas central étude géomorphologique. Edition du service géologique du Maroc Rabat.
Pr.A.Ntarmouchant/H.smaili/K.sabri. (2012) : Le volcanisme plio-quaternaire du moyen atlas. Région de timahdite.
Rachid ADALLAL. (2013) : Etude hydrochimique des systèmes lacustres et sédimentation actuelle dans les lacs Azigza et Tigalmamine (Moyen Atlas, Maroc).
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